Les « malls » fantômes hantent les Etats-Unis
Marché saturé, changement des habitudes d’achat… En dix ans, 200 de ces immenses centres commerciaux, symboles de la société de consommation américaine, ont fermé boutique. Et le mouvement s’accélère.
A trois kilomètres du nouveau siège d’Apple, à Cupertino, en plein cœur de la Silicon Valley, la scène paraît surréaliste. Un parking quasiment vide, des allées désertées, des dizaines de fonds de commerce abandonnés et des murs qui bloquent l’accès à des secteurs entiers : le Vallco Shopping Mall est un centre commercial fantôme, qui n’est sauvé de l’abandon total que par la présence d’un cinéma, d’une patinoire, d’un bowling et de trois restaurants.
Vallco n’est pas un cas isolé. Aux Etats-Unis, le modèle des « malls », le plus souvent suburbains et construits autour d’un ou de plusieurs grands magasins, s’essouffle. « Au cours des dix dernières années, environ 200 centres commerciaux ont fermé. Mais le pire reste à venir », prévient Garrick Brown, analyste au sein du cabinet Cushman & Wakefield. Selon lui, le rythme des faillites devrait ainsi s’accélérer à partir de 2019.
Un modèle né dans les années 1950
S’ils ne représentent plus qu’environ 10 % du commerce de détail en volume, les malls demeurent l’un des symboles de la société de consommation américaine. Leur développement a commencé dans les années 1950 lorsque la population a délaissé les centres-villes. « Pendant longtemps, le modèle a rencontré un grand succès, souligne June Williamson, professeure d’architecture au City College of New York. Les terrains étaient peu onéreux, la construction facile et des crédits d’impôt rendaient ces projets très profitables. Les promoteurs bâtissaient ainsi des malls quasiment identiques de ville en ville.
C’est l’une des raisons de leur déclin : avec plus de 1 100 centres commerciaux dans le pays, le marché est saturé. De manière plus globale, les Etats-Unis comptent près de 2,5 mètres carrés de surface commerciale par habitant, contre 0,6 en France et 0,3 en Allemagne. La tendance a été accentuée par les difficultés des chaînes de grands magasins.
Le Monde Par Jérôme Marin(San Francisco, correspondance)Publié le 17 octobre 2017