Ethnologue, engagée dans la Résistance dès 1940, Germaine Tillion (1907-2008), est déportée en 1943 au camp de femmes de Ravens- brück. Un hommage lui est rendu au Panthéon en mai 2015.
Les Tsiganes portaient […] un triangle noir. Je suis parvenue à leur parler, car plusieurs étaient françaises ou belges, et je me suis parfois cachée dans leur block. De façon évidente, les nazis ne voulaient rien en faire d'autre que les tuer, mais ils attendaient apparemment d'en avoir le temps, au cours, en quelque sorte, d'une « morte-saison » de l'assassinat. […]
Dans le long catalogue des crimes nazis, il faut souligner le martyre des Tsiganes : toutes les variétés d'assassinats ont été essayées sur eux, plus souvent que sur n'importe quel autre peuple, ils ont dû servir de cobayes pour les expériences « scientifiques », et, à Ravensbrück, si quelques Allemandes ont été stérilisées à titre punitif et individuel, il n'y eut de stérilisations en série que celles des Tsiganes – y compris les toutes petites filles, qui en sont mortes. Et pourquoi ?
Quel fut le crime de ces pauvres gens ? […] Les « lois raciales » de 1935 en firent des parias. Dès cette date, la nationalité allemande leur avait été retirée, et, dès 1938, ils furent mis en résidence surveillée et reçurent une pièce d'identité spéciale. Les premières déportations des Tsiganes eurent lieu en mai 1940, et en février 1943 un convoi tsigane arriva à Auschwitz.
Germaine Tillion, Ravensbruck, Seuil, 2015.