L’extension de la frontière entre le Suriname et la France [...] se caractérise aujourd’hui par un fort contraste entre les modèles urbains des villes frontalières, à l’image des deux plus importantes, Albina du côté surinamais et Saint‑Laurent‑du‑Maroni du côté français, qui connaissent également une forte porosité. Les deux pays exigent un visa d’entrée, mais la circulation des personnes et des marchandises entre les villes mentionnées ne présente pas de problèmes apparents. D’ailleurs, le Suriname a récemment remplacé le visa touristique de courte durée par une simple carte touristique dont l’obtention est très aisée pour les ressortissants français. Il y a de fait une claire dépendance économique du côté surinamien, qui a besoin des touristes guyanais et de leurs précieux euros, alors que beaucoup de produits commercialisés du côté français proviennent clandestinement du Suriname, où les coûts sont nettement moindres, au moyen de petites embarcations circulant de part et d’autre de la frontière. Si on y ajoute l’orpaillage illégal en Guyane par des garimpeiros brésiliens passés par le Suriname où l’accès leur est facilité du fait de l’absence de visa [...], cela fait de cette région une véritable région transfrontalière informelle faisant fi, le plus souvent, des contrôles douaniers et policiers.
Gutemberg de Vilhena Silva, « Litiges transfrontaliers sur le plateau des Guyanes, enjeux géopolitiques à l’interface des mondes amazoniens et caribéens », L’Espace politique, 2017.