Après le port du Pirée passé sous pavillon chinois il y a un an, la Grèce tente d’attirer toujours plus d’investissements en provenance de Chine.
« Depuis l’an dernier, avec la cession de 67 % de la société du Pirée à Cosco et la visite du premier ministre Alexis Tsipras à Pékin, nos relations avec la Chine n’ont cessé de s’améliorer. Ainsi en mai, nous avons signé un plan triennal avec le gouvernement chinois pour encourager ses investissements en Grèce », note Stergios Pitsiorlas, ministre adjoint à l’économie et au développement et ancien directeur de l’agence des privatisations (HRADF) dans son bureau athénien près du Parlement grec.Le mois suivant, la société chinoise State Grid Corporation a acquis 24 % du capital de l’opérateur du réseau électrique, Admie. Et ce n’est pas terminé. Le conglomérat Fosun est actuellement en négociation pour investir dans l’ancien aéroport d’Elliniko, dans la banlieue balnéaire d’Athènes, qui doit être transformé en grand complexe hôtelier de luxe.
Cette ouverture à la Chine s’inscrit dans le vaste plan de privatisations mené par Athènes. La Grèce s’est, en effet, engagée dans le dernier accord signé avec ses créanciers à récolter 50 milliards d’euros sur cinq ans grâce aux privatisations. Mais depuis 2011 et la création de l’agence grecque de privatisations, les 35 opérations réalisées n’ont rapporté que 3,4 milliards.
Signe que 2017 est l’année de la Chine, le pays sera l’invité d’honneur à la Foire internationale de Thessalonique en septembre, un des plus grands événements économiques en Grèce. « Les investissements chinois devraient se multiplier à l’avenir, estime George Tzogopoulos, fondateur du site Internet chinaandgreece.com, qui prodigue des conseils aux investisseurs chinois et grecs. Pour le moment, nous sommes loin du cliché d’un rachat de la Grèce par la Chine. »
Peut-être, mais selon Spiros Roukanas, professeur d’économie internationale à l’université du Pirée et spécialiste de la Chine, la relation est déséquilibrée. « Jusqu’à présent, les investissements chinois sont d’une importance certaine pour la Chine car ils s’insèrent dans son plan stratégique de reconstruire une “nouvelle route de la soie” visant à relancer les exportations chinoises à partir du port du Pirée, notamment vers l’Europe centrale et occidentale. Mais les retombées pour l’économie grecque ne sont pas, pour l’instant, significatives. »
Un avis contesté par M. Pitsiorlas, au ministère de l’économie : « Le Pirée s’est hissé du rang de onzième port en Méditerranée en 2006 à celui de troisième en 2016. Depuis un an, le trafic des bateaux de croisière a augmenté de 12 %, et celui des conteneurs de 30 %. L’économie grecque ne peut avoir que des retombées positives de l’accroissement de ces échanges. »
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https://www.lemonde.fr/europe/article/2017/07/31/pour-pekin-la-nouvelle-route-de-la-soie-passe-par-athenes_5166787_3214.html
Konstantinos Giannidis, président de la chambre de commerce sino-hellénique, se veut aussi positif : « Les investissements entraînent les investissements. Plus il y a d’étrangers – chinois ou non d’ailleurs – financent des projets en Grèce, plus c’est le signe que le pays se remet tout doucement de la crise. Evidemment, il y a toujours des réticences. Que les entrepreneurs chinois fassent des bonnes affaires à cause de la crise, c’est évident, mais ils offrent également à la Grèce la possibilité de créer des emplois et de remettre certaines entreprises sur pied ! »
A Maroussi, dans la banlieue nord d’Athènes, le bureau de Nikoletta Kaperoni, directrice d’un cabinet de conseil et d’audit qui travaille essentiellement avec la Chine, est parsemé de drapeaux chinois, d’estampes et de calligraphies. « Le secteur privé chinois manifeste son intérêt mais il reste freiné par la forte imposition en Grèce. Que certains ressortissants chinois obtiennent des visas parce qu’ils achètent des biens immobiliers en Grèce de plus de 250 000 euros n’est pas un plan de développement… Dans les pays d’Europe centrale, comme en Pologne, en Albanie et en Bulgarie, des zones détaxées ont été créées pour attirer les investisseurs étrangers ; pourquoi ne pas faire la même chose en Grèce ? », s’interroge-t-elle.
Impossible, explique M. Pitsiorlas, en raison des engagements pris jusqu’en 2018 avec les créanciers. « Mais nous avons d’autres avantages compétitifs par rapport aux pays d’Europe centrale : nous faisons partie de la zone euro, nous avons une main-d’œuvre qualifiée, de bonnes technologies, une position géographique exceptionnelle entre l’Orient, l’Occident et les Balkans, et une culture antique qui attire toujours plus de visiteurs chinois (+ 30 % par rapport à 2016), énumère le ministre. La Chine est un nouveau paramètre que nous devons explorer sous tous les angles. »
lLe Monde , Par Marina Rafenberg(Athènes, intérim) Publié le 31 juillet 2017