En mars 2012, les islamistes radicaux d'Al-Qaida au Maghreb islamique, du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao) et d'Ansar Dine, ont occupé le nord du Mali, alliés aux mouvements indépendantistes touareg. Dans les mois qui suivirent, à Gao et à Tombouctou, les destructions de mosquées et de mausolées se sont multipliées. Ces édifices de terre crue et de sable sont le symbole d'un islam ouvert, imprégné des préceptes de la confrérie soufie Qadiriya, qu'Ansar Eddine et ses mouvements frères entendent éradiquer. En s'attaquant aux sites classés, les extrémistes nient une identité complexe et un islam historiquement tolérant : devenus majoritairement musulmans, avec une minorité chrétienne, les Dogon n'ont pas renoncé à leurs traditions animistes. Craignant les effets des combats, des frappes aériennes et des pillages, Irina Bokova, directrice générale de l'Unesco, a adressé mardi 15 janvier une lettre aux autorités françaises et locales engagées dans les opérations militaires au Mali. Elle leur demande de «tout mettre en œuvre pour protéger le patrimoine culturel du pays, déjà gravement endommagé» […].
À la détestation de la représentation artistique, de la musique, de toute manifestation sacrée sortant du culte exclusif de Mahomet, s'ajoutent les tentations de trafics en tout genre et de vols en bandes organisées.
Ainsi, tout concourt à faire du riche patrimoine du nord du Mali une victime collatérale de la guerre.
Véronique Mortaigne, « Au Mali se joue aussi une guerre culturelle », Le Monde, 17 janvier 2013.