Un monde bipolaire de 1945 aux années 70
Thème 2 Histoire : la multiplication des acteurs internationaux dans un monde bipolaire (de 1945 aux années 70)
Notre objectif final est la création d'un magazine à l'aide de l'application Madmagz .

Vous allez devoir rédiger un article répondant à la consigne et s'appuyant sur l'analyse de deux documents. Vous trouverez à droite la consigne et les documents à analyser, à gauche des documents pour acquérir des connaissances et mettre en perspective vos documents.
Allemagne année zéro - Bande Annonce
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Manuel :
doc 3 p 115
Doc 1 p 114/ doc 2 p 115
P78/79
Manuel p 115
 

Allemagne année zéro de Roberto Rossellini

(Germania anno zero, 1948) de Roberto Rossellini
llemagne année zéro est le troisième volet d’un ensemble communément appelé « trilogie de la guerre » dans l’œuvre de Rossellini et qui comprend Rome, ville ouverte (1945) et Paisà (1946). Ces films marquent une rupture capitale non seulement dans la carrière de Rossellini mais aussi dans toute l’histoire du cinéma. Considérés comme l’acte de naissance du néoréalisme, cette trilogie constitue également une date clé de la modernité cinématographique. Rossellini décide de remettre en question les principes esthétiques du cinéma et sa fabrication devant la catastrophe morale que représentent la Seconde Guerre mondiale et ses conséquences sur les populations européennes. Si les deux premiers films étaient des récits choraux, volontairement fragmentaires, qui entendaient restituer la réalité de l’Italie durant l’occupation allemande puis la libération par les forces alliées par la multiplicité des points de vue et des destinées humaines, Allemagne année zéro adopte un parti-pris opposé. Il s’agit au contraire de raconter un pays vaincu, et une ville en ruine, à travers le regard d’un enfant de douze ans, à la fois témoin et victime d’un désastre provoqué par les adultes. Fidèle à son approche documentaire, Rossellini tourne dans les décombres de Berlin dans l’après-guerre, et capte la misère d’un peuple obligé à se livrer au marché noir et à la prostitution pour survivre. Les images au début du film d’un cheval mort dépecé en pleine rue par des berlinois ne s’oublient pas. Ce qui va suivre non plus. Rossellini montre que les résidus pervers du nazisme, cachés dans les ruines, continuent de distiller leur venin dans la jeunesse allemande tandis que le pays, anéanti par la folie meurtrière du IIIème Reich, peine à se reconstruire. Après avoir filmé la résistance et la libération dans Rome ville ouverte et Paisà,Rossellini s’intéresse aux séquelles morales et matérielles de la guerre. Il ne s’agit pas de stigmatiser un pays vaincu mais de constater l’héritage terrible légué aux générations futures. Ce constat pessimiste annonce Europe 51, autre œuvre majeure de Rossellini, dans laquelle une nouvelle fois un enfant commet un geste radical pour échapper à un monde sans amour ni espoir.
Arte
1939-1945 : Londres, Tokyo, Dresde, à l'heure des bombardements massifs
Il y a 75 ans, l’aviation britannique et américaine larguait 3 900 tonnes de bombes sur Dresde, tuant 25 000 personnes ; sort que connurent aussi Londres, Hambourg, Tokyo, Hiroshima ou Nagasaki. La guerre totale fit tomber l’interdit de cibler les civils mais la stratégie fut loin d'être efficace.
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Imaginez-vous être un reporter devant raconter la situation européenne en 1945, et pour cela vous décidez de rencontrer R. Rosselini et A. Camus.

Vous montrerez les destructions matérielles, l'effroyable bilan humain, mais surtout une angoisse face au futur suite à la prise de conscience de ce que notre civilisation a pu faire lors de ce conflit.

Le 8 aout 1945, deux jours après l’utilisation de la première bombe atomique sur la ville d’Hiroshima et sa région, Albert Camus (1913-1960)écrit ce texte dans le journal Combat.

Le monde est ce qu’il est, c’est-à-dire peu de chose. C’est ce que chacun sait depuis hier grâce au formidable concert que la radio, les journaux et les agences d’information viennent de déclencher au sujet de la bombe atomique. On nous apprend, en effet, au milieu d’une foule de commentaires enthousiastes que n’importe quelle ville d’importance moyenne peut être totalement rasée par une bombe de la grosseur d’un ballon de football. Des journaux américains, anglais et français se répandent en dissertations élégantes sur l’avenir, le passé, les inventeurs, le coût, la vocation pacifique et les effets guerriers, les conséquences politiques et même le caractère indépendant de la bombe atomique. Nous nous résumerons en une phrase : la civilisation mécanique vient de parvenir à son dernier degré de sauvagerie. Il va falloir choisir, dans un avenir plus ou moins proche, entre le suicide collectif ou l’utilisation intelligente des conquêtes scientifiques.
En attendant, il est permis de penser qu’il y a quelque indécence à célébrer ainsi une découverte, qui se met d’abord au service de la plus formidable rage de destruction dont l’homme ait fait preuve depuis des siècles. Que dans un monde livré à tous les déchirements de la violence, incapable d’aucun contrôle, indifférent à la justice et au simple bonheur des hommes, la science se consacre au meurtre organisé, personne sans doute, à moins d’idéalisme impénitent, ne songera à s’en étonner. [...]
Voici qu’une angoisse nouvelle nous est proposée, qui a toutes les chances d’être définitive. On offre sans doute à l’humanité sa dernière chance. [...]Qu’on nous entende bien. Si les Japonais capitulent après la destruction d’Hiroshima et par l’effet de l’intimidation, nous nous en réjouirons. Mais nous nous refusons à tirer d’une aussi grave nouvelle autre chose que la décision de plaider plus énergiquement encore en faveur d’une véritable société internationale, où les grandes puissances n’auront pas de droits supérieurs aux petites et aux moyennes nations, où la guerre, fléau devenu définitif par le seul effet de l’intelligence humaine, ne dépendra plus des appétits ou des doctrines de tel ou tel État.
Devant les perspectives terrifiantes qui s’ouvrent à l’humanité, nous apercevons encore mieux que la paix est le seul combat qui vaille d’être mené. Ce n’est plus une prière, mais un ordre qui doit monter des peuples vers les gouvernements, l’ordre de choisir définitivement entre l’enfer et la raison.

ALBERT CAMUS, extrait de l’éditorial du journal Combat, 8 aout 1945, recueilli dans Actuelles Chroniques 1944-1948, Œuvres complètes, tome II, © Éditions Gallimard.
Photographie extraite du film de R Rosselini , Berlin année zéro